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Chez Mélopée
17 mai 2010

La chambre d'amie d'Helen Garner

Mon escale australienne n'est pas finie et laissez-moi vous parler aujourd'hui d'un livre qui m'a remuée. Qui ne serait pas touché par un tel sujet?

la_chambre_damie

 

Nicola est une séduisante sexagénaire originaire de Sydney. Elle débarque à Melbourne chez son amie Helen qui est disposée à l'accueillir pendant trois semaines. Un banal séjour touristique me direz-vous? Il n'en est rien car Nicola est en phase terminale d'un cancer. Elle vient donc en "pèlerinage" afin de faire une cure de la dernière chance dans une clinique qui lui promet guérison. C'est donc une malade très motivée qui se rend quotidiennement à ses séances curatives afin d'évacuer les toxines et de "faire la peau à ce satané cancer". Mais on sent qu'Helen est bien plus réaliste sur la situation : que la clinique parait louche, que les praticiens semblent être des charlatans qui profitent du désespoir de malades condamnés pour engranger un bon pactole et donner de grands espoirs de renouveau.

L'histoire prend un ton très grave au fil du récit lorsque Nicola devient de plus en plus obstinée et qu'elle garde des œillères malgré les pratiques de plus en plus douteuses dont elle fait l'objet : injections de vitamine C, bains de café...
Helen plus lucide se fatigue, presque autant que la malade, à remuer ciel et terre pour mettre à jour les faiseurs de rêve, pour gérer les tracas quotidiens (linge à changer, trajets à effectuer : une occupation de garde-malade à plein temps). Et on a le cœur gros lorsqu'on voit ce que les deux dames endurent : on se rend compte que chacune à sa manière tente de lutter et de mener à bien son destin. C'est difficile de voir qu'au cours des trois semaines toute l'énergie sera mise à rude épreuve et c'est donc très déroutant de voir le parcours de ces deux amies quelque part voué à l'échec. Pourtant Nicola est touchante de courage, fière et altière, toujours arborant un sourire pour cacher douleur et souffrance. Quant à Helen, pudique et pleine d'attentions, elle tente de rendre les jours plus faciles, elle tente de garder la barre haute, de masquer tout le désarroi derrière un entrain inflexible.

J'en ai eu la boule à l'estomac de lire ce livre et ai réfréné quelques boules de chagrin qui affluaient à la gorge. Bien que n'ayant jamais côtoyé le cancer de très près, j'ai été touchée par ces deux destins de femmes qui se jouent en trois semaines. Car le compte à rebours a commencé, car on sent que le cancer tous les jours prend du terrain. Et plus on se familiarise à l'environnement hospitalier aux pratiques louches plus on se dit que la forte Nicola fonce dans le mur et qu'il faut au plus vite la détourner de ces rapaces qui la dépouillent (sous et énergie en prennent un coup).
Au gré des semaines, on passe par différents sentiments : le découragement, la révolte, la tristesse, l'empathie... car on se rend compte que la maladie n'épargne personne. Si Nicola est la proie d'un système bien établi, Helen est elle aussi prise dans la tourmente, obnubilée à l'idée de sauver son amie.
Terrible témoignage qui ne peut laisser insensible, d'autant qu'on apprend que le livre est titré d'une histoire vraie. Je le referme ébranlée et me dis qu'il était nécessaire dans la production éditoriale pour montrer les ravages de la maladie non seulement sur le corps mais faussant également toute relation humaine.

J'ai commencé par changer le lit de place pour l'orienter nord-sud. N'est-ce pas ainsi qu'on aligne la dormeuse avec l'énergie positive de la planète? C'est ce que Nicola aurait dit. J'ai aussi mis des draps neufs, rose pâle, car elle avait un sens inné des couleurs et parce que le rose flatte même les teints jaunâtres. (p.9)

Quelle claque !

La chambre d'amie - Helen Garner ; traduction de Bernard Turle (Philippe Rey, 2009, 138 p.)

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Commentaires
M
Olala, ça fait froid dans le dos! Je le note en tout cas. Merci, je ne connaissais pas du tout.
M
@ Cathulu : C'est aussi un thème qui m'intéresse beaucoup ! D'ailleurs je suis en plein dans une lecture qui met en scène deux jeunes filles liées par une amitié qui va s'avérer destructrice.
C
Je le onte car le thème de l'maitié féminine m'intéresse beaucoup.
M
@ Diddy : Très bon choix ! J'ai bien hâte de lire ton avis.
D
Je le note.
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