Récits du bush de Paul Wenz
En route pour le bush australien, dépaysant et splendide de naturel !
Quel court recueil que celui-ci ! Vite lu, vite digéré, il est néanmoins
fort instructif car il s'appuie à identifier l'Australie dans ce qu'on
appelle le bush c'est-à-dire la campagne, loin des grandes villes
urbaines. C'est au travers de trois nouvelles, que je qualifierais
plutôt d'encarts, qu'on intègre certaines notions du bush de l'époque
(début du XXème siècle). Ce sont des instantanés qui sont livrés ici
dans toute la soudaineté et le naturel de personnalités et de paysages
pris sur le vif.
La première nouvelle montre comment les
indigènes s'intègrent aux foyers de riches propriétaires terriens. Ils
sont chargés des tâches ménagères mais sont priés de rester à bonne
distance des enfants. Dans la famille que nous suivons c'est une jeune
indigène Picky qui est adoptée par une famille de blancs. Malgré
l'éducation stricte qu'elle reçoit d'une fervente catholique, Picky
semble malgré tout fascinée par les gens de couleurs et par la vieille
Mary avec qui elle a fui lorsque les "troopers" (police à cheval) les
ont chassé en tuant l'essentiel de leur tribu d'appartenance. Et si les
racines reprenaient le dessus?!
Deuxième nouvelle et toute autre
ambiance. Nous sommes avec les Murphy, famille pauvre où tous
travaillent même le fils Pat. Celui-ci tombe malade ce qui influe sur le
moral de tous. On apprend que dans les régions rurales du bush, la
médecine peine à parvenir aux malades même les plus fiévreux. C'est tout
un décalage et on se rend compte qu'il y a encore fort à faire dans les
campagnes (et pas seulement dans les australiennes).
Troisième
nouvelle et là aussi on découvre un autre angle de vue. C'est à Forbes
qu'un mystère plane puisque des moutons disparaissent régulièrement du
domaine des Campbell. Personne n'est particulièrement soupçonné mais on
ouvre l'œil. Parallèlement, une jeune cavalière, Nora, sème le trouble
chez notre narrateur, Mac Tavish. Deux éléments perturbateurs qui
pourraient malgré tout avoir un lien. C'est une sorte de mise en scène
où les cowboys ont leur place et où le bétail est surveillé de près.
Il était depuis assez longtemps dans le bush pour
avoir appris à lire sur le sol comme dans un livre, et vit de suite les
empreintes fraîches de quelques moutons conduits par un chien et pressés
dans l'angle de la barrière. (p. 51)
L'avantage des
nouvelles est qu'on est immédiatement dans le bain, dans le feu de
l'action de cette atmosphère très spéciale et qui m'était inconnue : le
bush. Cela peut être un inconvénient car les histoires sont très peu
développées, les personnages ne semblent pas avoir de psychologie qui
nous les rendent particulièrement attachants (ils en ont sans doute mais
sont plus dans les faits et gestes que dans le développement
introspectif).
Pour une entrée en matière j'ai trouvé que ces
nouvelles étaient malgré tout très efficaces : le style de Wenz est concis,
ciselé... à la manière de ces grands écrivains sortis d'un entre temps.
Le
vocabulaire empli de ce jargon australien nous met d'autant plus dans
l'ambiance qu'on se laisse prendre au jeu, qu'on tourne les pages avec
entrain, assimilant tout un contexte et une époque.
Une jolie
découverte !
Récits du bush, trois nouvelles australiennes - Paul Wenz (La petite maison, 1998, 55 p.)